La biodiversité marine n’intéresse pas les Grands, ou si peu, et pourtant pesticides et brevetage de ce vivant la menacent.

A Brest, en février 2022 s’est déroulé le « Sommet pour les Océans » (One Ocean Summit), conférence internationale avec 40 pays représentés pour l’élaboration du Traité sur la Haute mer dans le cadre de l’ONU.

C'est dans les brumes de cette rencontre, que se sont tenus de grands discours sur les AMP (Aires Marines Protégées), les transports maritimes pas vraiment « verts » et surtout sur l’exploitation minière. Il a bien évidement été peu question du « petit peuple de la mer » (cf note 1). La biodiversité marine n’intéresse pas les Grands, ou si peu, et pourtant pesticides et brevetage de ce vivant la menacent.

 

Plancton et herbicides

Le plancton, qui constitue le « petit peuple de la mer », correspond à l’ensemble des êtres vivants qui se laissent dériver au gré des courants marin, il est à la base de la chaîne alimentaire marine. Le premier, le phytoplancton apparu sur la planète, est constitué de bactéries, de microalgues unicellulaires ou de cellules reliées en chaînes (ex. les diatomées). Ce plancton végétal photosynthétique, fixe le CO2, et produit 50% de l’O2 nécessaire à la vie sur la planète Terre. En fin de vie il sédimente emmenant au fond une grande quantité de carbone. Il est mangé par le zooplancton, constitué lui de protozoaires, de dinoflagellés, de crustacés, de mollusques, méduses, de larves de poissons etc.... 80% du zooplancton se constitue en zone tempérée et froide par les copépodes (crustacés). Il est lui-même mangé par les animaux de la mer : poissons, mammifères marins etc...

Le réchauffement climatique, l’augmentation du CO2 et par corollaire l’acidité de l’eau, perturbent la densité et la répartition de ces planctons; ceux-ci évoluent également sous l’effet des pesticides.  L'utilisation en agriculture d'herbicides sur des plantes tolérantes aux herbicides (VTH), que ce soit par enrobage des graines, de pulvérisation, d’épandage, se retrouvent dans le sol, l’eau des rivières et dans les estuaires. Par exemple, pour un épandage de round UP (2kg /Ha), 10% est stocké dans la plante ou dégradé, on en retrouve 90% dans le sol et environ 10% est transféré dans l’eau de ruissellement qui rejoint les rivières et 10mg/L vont ainsi rejoindre les zones côtières et se diluer. Des concentrations actives de 1mg/L ont été mesurées dans les eaux côtières.

Les chercheurs de l'Ifremer ont mis en évidence que l'utilisation, en nette augmentation, de ce type de formulations (qu'on trouve dans le commerce) sont des plus toxiques. Ils alertent : « globalement, les molécules chimiques retardent la croissance du phytoplancton, en retardant la division cellulaire, sélectionnent des espèces (les diatomées, potentiellement toxiques, résistent mieux), modifient l’équilibre des populations et entraînent des modifications génétiques (F.Quiniou et G.Arzul, écotoxicologues, cf note 2).  Les pesticides exercent un stress chimique = ralentissement de la croissance,  mort de certaines espèces, multiplication d’espèces toxiques, modifications de l’ADN etc... L’efficacité agricole espérée devient toxicité marine.

 

Plancton et brevetage du vivant

Un article de la revue « Reporterre » en juillet 2018 (cf note 3) titrait de la biodiversité marine qui fait l’objet d’un nombre croissant de dépôts de brevets. « L’or bleu » que constitue la biodiversité marine est exploité depuis 1998; en 2017 47% des séquences d’ADN brevetées, sur les 13000, l’étaient par BASF alors que les Universités n’en avaient brevetées que 12%, les autres étaient réalisées par 220 entreprises. Ces brevets portaient sur 862 espèces marines dont 73 % de microorganismes et 11% d’espèces des abysses. La filière des semences est présente dans ce brevetage de la biodiversité marine. L’article parle même d’un Colza dont la génétique est "enrichie" d' oméga-3.

A quand une protection juridique juste et équitable en matière de biodiversité marine ? Cette garantie devrait faire partie du Traité sur la Haute mer dont il était question à Brest. La Haute mer couvre en effet 46% de la surface de la Planète, or le Protocole de Nagoya, lui, couvre et garantit cette protection juridique seulement sur les régions côtières et les régions terrestres. Pourquoi plusieurs des brevets déposés n’indiquaient pas l’origine géographique de la séquence ? Le Traité de la Haute mer ne devrait-il pas, plutôt aborder le problème des ressources génétiques marines dans la Zone ne relevant pas de la juridiction nationale (ZADJN, cf note 4) ? Mais voilà 15 ans qu'ils en discutent !

 

« ICI commence la mer » nous indiquent certaines plaques d'égouts dans les villes côtières, cette mer qui nous nourrit, nous permet de respirer et qui constitue notre patrimoine reste une zone à défendre par tous et donc aussi par les faucheuses et faucheurs volontaires d'OGM.

 

MN (FV29)

 

1. https://peche-dev.org/spip.php?article308  « Pourquoi les sardines raffolent des châtaignes »

2. https://www.canal-u.tv/chaines/maisonmer/2015/plancton-marin-et-pesticides-quels-liens

3. https://reporterre.net/BASF-le-geant-de-la-chimie-mondiale-s-approprie-la-biodiversite-des-oceans

4. https://www.highseasalliance.org/wp-content/uploads/2020/01/HSA-LBTreaty_French_Oct19_web.pdf

(Article en pdf à télécharger: « Protéger la moitié de la planète : Un nouveau traité sur la biodiversité de haute mer en 2020 »)

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